LES MARAIS

 

Découverte Sensorielle des Marais de Glénac.

Etymologie du Mot Mortier.

Présentation  Générale.

Formation des Marais.

Carte Géologique.

La Mer des Faluns.

L’Île  aux  PIES.

La  Flore des  Marais.

Les Arbres

Les Fleurs

Le  Lin et  Le  Chanvre.

Le  Foin.

La Faune

Les Poissons

Les Amphibiens

les Insectes

Les Oiseaux

Vie  dans  les  Marais.

    Légendes -Histoire de Pêcheurs

    

Découverte Sensorielle des Marais de Glénac

 

L’émerveillement face à une grenouille, pas celle qui veut se faire plus grosse que le bœuf, mais la vraie, la coquine des marais dont l’image mobile me reste collée au cœur. Pas écrasées, pas dans notre assiette, libres, les grenouilles,leurs ballets ponctuant l’air et l’eau. Pas besoin de télévision, la nature m’offrait ses  programmes pleins d’amour et de batailles pour la survie. Je me dis souvent que la vie, c’est un regard. Si tu n’as pas de regard, tu es mort. On dit bien un regard mort…

La [1]découverte sensorielle des marais de Glénac reste la photo magique de l’enfance. Je devais avoir 16 ou 17 ans et ce marais enchanteur m’a donné le goût de la nature.

La nature de mes 16 ans est liée au souvenir de la pêche avec mon père et des ballades, avec celle qui devait devenir ma femme, qui m’ont fait découvrir ces paisibles espaces aquatiques où l’on peut à l’envie rêver, penser et panser certaines éraflures de l’âme. La contemplation agit en détente et il en reste toujours quelque chose. Il y a ainsi dans la vie des moments clés. Et même lorsqu’ils sont durs, le temps les rend doux et utiles.

Il fallait collectionner du regard, faire vivre le beau et le bon, pas le détruire.


 

Etymologie du Mot Mortier

 

Les Marais de Glénac sont aussi appelés le MORTIER et  parfois LAC. [2]

 Origines de cette appellation – Définitions

 Mortier - Sens du toponyme : lieu boueux, marécage.

   Toutes les définitions de mots approchant (morte par exemple) désignent une mare, de l'eau stagnante ou trou profond rempli d'eau.

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Mortier vient du latin « mortarium » qui veut dire auge, mortier (ciment).

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  Localité portant ce nom (le Mortier, les Mortiers), très répandu en France du Nord.

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Un trou d'eau, une fosse convient bien au lieu  En Franche-Comté et le Morvan, Morte est restée avec le sens de lieu où l’eau dort .

 

Présentation  Générale

 

Le Mortier de Glénac représente la plus vaste surface en eau des Marais de Vilaine. Situé à la confluence de l'Aff et de l’Oust, le site du Mortier de Glénac est doté d'un fort pouvoir attractif pour le tourisme de loisirs (activités nautiques et de plein air). Il se compose de vastes surfaces de formations marécageuses, localisées dans la partie aval de l'Aff et dans le lit majeur de l'Oust en amont du plan d'eau. Depuis la rive Est, sur le secteur de l'Ile aux Pies notamment, il est possible d'avoir de très belles vues du site, du haut des affleurements rocheux.

Le mortier s'étend sur 410 ha  sur 20 ha (au départ) . L'OUST a été reprofilé en 1982 et l'endroit classé " Site protégé " avec l'ensemble de l'Ile aux Pies, par le ministre de L'Environnement le 18 Mai 1981.

 

CARTE du MORTIER

 

Le plan d'eau lui-même n'est pas particulièrement pourvu de végétation, mis à part quelques stations ponctuelles de potamots[3], les abords sont en revanche plus intéressants.

POTAMOTS

 

On y retrouve des prairies marécageuses, des formations de marécage (magnocariçaies, grandes glycériaies, phragmitaies et phalaridaies), ainsi que de larges herbiers à nénuphars. Dans ces formations rivulaires, la pénétration est difficile voire risquée et seule une embarcation permet de découvrir ce site. On observe également un développement des saulaies sur les rives de l'Aff.

Depuis ces dernières décennies, on constate que le plan d'eau se comble. Ce phénomène est accéléré par la présence de la jussie qui s'est fortement implantée au niveau du Mortier de Glénac.

Ø    Flore : aulnes, saules, iris d'eau, roseaux, joncs, nénuphars blancs, lentilles d'eau, élodées du Canada etc..

Ø Faune : anguilles  (ventre jaune), perches, tanches, gardon, brèmes, carpes, sandres, brochets pêchés par les gens du pays aux engins filets, nasses mais aussi par la plupart des autres pêcheurs au lancer ou à la pêche au coup.    Hérons, sarcelles, vanneaux, poules d'eau, bécasseaux, et oiseaux migrateurs venant du Groenland par l'Islande et les Iles Britanniques, venant du Grand Nord de la Scandinavie ou de l'Urss.

   Le Mortier de GLENAC est un gîte d'étape pour les oies sauvages, un lieu de couvaison pour les sarcelles d'été qui arrivent en Mars et repartent en Octobre et des sarcelles d'hiver, un hébergement pour les bandes de cols-verts. Les canards trouvent refuge dans la roselière. Les chasseurs connaissent bien ces " passées " de canards, mais déplorent leur disparition progressive.

Certaines surfaces des marais de GLENAC sont maintenant cultivées par les agriculteurs pour le maïs.

   Particulièrement les soirs d'automne, son manteau ouaté nous rappelle " La Dame Blanche " chère à Paul FEVAL, célèbre romancier du XIXe siècle.

 

FORMATION DES MARAIS

Les marais[4] de Redon et des environs reposent sur un socle constitué de roches métamorphiques (gneiss, migmatites, granités) et de roches sédimentaires (grès quartzites et schistes). Les mouvements tectoniques, les plissements, l'érosion, la sédimentation, les variations climatiques sont à l'origine du réseau hydrographique actuel du bassin de la Vilaine et des marais qui lui sont associés.

Ère Primaire

CARTE GÉOLOGIQUE de la BRETAGNE

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 Au début du primaire, commence la submersion marine de la pénéplaine briovérienne. Dans le Massif Armoricain, les premiers dépôts sédimentaires (Poudingue de Montfort et schistes pourprés de Pont Réan) sont à la base de la deuxième période du primaire, l'ordovicien. Aux périodes suivantes du primaire (-500 à -345 Ma), de l'ordovicien inférieur jusqu'à la fin du dévonien, on observe une alternance de grès et de schistes caractérisant une sédimentation marine de sables et de vases. Les grès se forment par adhésion des grains de sédiments sableux, les schistes par celle de sédiments vaseux.

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 A la fin du dévonien pour le Massif armoricain, la phase bretonne débute l'orogenèse hercynienne, une plaque sud-armoricaine affronte la plaque nord-armoricaine. La géographie des continents de l'époque n'a pas grand-chose à voir avec celle d'aujourd'hui. L'Océan Atlantique n'existe pas encore et la plaque sud armoricaine et la nord américaine n'en font qu'une. La plaque nord armoricaine est aussi attachée à la plaque nord européenne. L'orogenèse hercynienne accompagnée de migmatisations et granitisations intenses aboutit à la formation de hauts reliefs, à des altitudes supérieures à celles de l'Himalaya actuel. L'orogenèse comporte plusieurs phases paroxysmiques et dure plusieurs millions d'années. Dès le début de la surrection des montagnes, commence l'érosion qui va mettre en relief les couches les plus dures et les plus résistantes, en creux les plus tendres. L'érosion peut mettre en relief des synclinaux et inversement en creux des anticlinaux.

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 L'orogenèse hercynienne ne se limite pas au Massif Armoricain, mais concerne une grande partie de l'Europe de l’Ouest, comprenant également le Massif Central et la Montagne Noire. Elle se poursuit vers le Nord-Est par les Cévennes puis les Vosges, vers la Belgique et l’Allemagne. A l’Ouest du Massif armoricain cette chaine se poursuit par les Appalaches aux Etats-Unis, mettant en évidence la liaison de la plaque sud-armoricaine à la plaque nord-américaine.

 

Ère Secondaire

                            Bien que soumis à une intense érosion, le Massif Armoricain va pratiquement rester entièrement exondé à l'ère secondaire, ce qui fait qu'il n'y a que très peu de sédiments de cette ère en Bretagne.

Ère Tertiaire

                               L'ère Tertiaire (-65 à -2 Ma) est marquée par des mouvements importants au niveau des plaques tectoniques qui entraînent l'orogenèse alpine et un basculement nord-sud du Massif Armoricain. Il en résulte une Bretagne à côtes, à falaises élevées au nord, à rivages plus bas au sud.

Une autre conséquence de cette modification des reliefs, les fleuves et rivières qui avaient tendance à s'écouler d'Est en Ouest ou d'Ouest vers l'Est, suivant les directions des reliefs primaires, vont s'écouler du Nord au Sud et inversement, profitant des cassures et des pentes ravivées dans ces nouvelles directions.

CARTE GEOLOGIQUE

 

La Mer des Faluns

 

            Il y a une quinzaine de millions d'années, la mer envahit la vallée de la Rance au nord du Massif Armoricain, puis celle de la Vilaine au sud et enfin tout le bassin de Rennes. Le reste de la partie occidentale du Massif Armoricain devient une île  dont seuls apparaissent les sommets des hauteurs. Cette nouvelle mer qui s’étend de Saint-Malo à l’extrémité sud de la Vendée, est dénommée Mer des Faluns. Le niveau élevé de cette nouvelle mer, submergeant la plupart des reliefs entourant la Vilaine et l’Oust, va permettre à ces deux cours d’eau de franchir les obstacles est - ouest et de couler du nord vers le sud pour atteindre l’océan Atlantique.

L'eau s'écoulant vers le Sud est venue buter contre les reliefs est - ouest. Elle s'est accumulée derrière eux jusqu'à atteindre un niveau suffisant pour les franchir au niveau de leurs zones les plus basses. Une série de lacs communiquant les uns avec les autres s'est formée. Peu à peu, l'érosion se poursuivant, les obstacles est - ouest se sont creusés et les lacs se sont vidés. Les zones basses des reliefs correspondent souvent à des cassures plus ou moins nord - sud, ce sont des zones de moindre résistance à l'érosion. Ces cassures ont été pour certaines produites par le contrecoup du plissement alpin dont les pressions se sont exercées de l'est /sud - est vers l'ouest/nord-ouest.

Elles sont généralement perpendiculaires aux pressions qui les produisent, donc ici, elles seront plutôt sud / sud - ouest, nord/nord - est. Ces failles tertiaires vont recouper les préexistantes plutôt est - ouest du primaire.

Une étude des cartes topographiques montre que la Vilaine, quand elle franchit les reliefs, coule du nord vers le sud. C'est là que sa vallée est aussi le plus souvent la plus étroite. Elle coule d'est vers l'ouest dans les zones les plus basses. Là, sa vallée est généralement la plus large et c'est dans ces parties que se trouvaient autrefois des lacs et aujourd'hui les marais.

A la fin du tertiaire, l'allure générale des réseaux hydrographiques de la Vilaine et de l'Oust est à peu près celle d'aujourd'hui.

 

CARTE des FAILLES

 

Sur ce schéma, établi à partir de la carte géologique de Redon, les failles sont représentées par des traits rouges. Les traits pleins correspondent aux failles observables sur le terrain, ceux en pointillés, les failles supposées. Nous pouvons remarquer qu'il existe deux directions principales pour ces failles : une ouest / nord - ouest \ est / sud - est, correspondant au plissement hercynien, la deuxième nord / nord - est \ sud / sud - ouest, correspondant au plissement alpin.

Le lit de la Vilaine et de l'Oust suivent grossièrement ces directions.

Finalement, les cours nord - sud des rivières et fleuves de la Bretagne doivent leurs directions définitives au plissement alpin.

La Mer des Faluns a déposé des sédiments constitués de calcaires gréseux, de boues calcaires et de sables plus ou moins coquilliers (oursins, coquillages, dents de poissons), appelés Faluns. Au niveau de Redon, il n'y a pas de dépôt de Faluns défini, faute de fossiles et de véritables discontinuités. Les sables roux qui pourraient correspondre à cette période ne peuvent pas être distingués des sables roux plus tardifs. Les traces de sédimentation marine nettement reconnues commencent seulement fin du miocène, début du pliocène, par les formations redoniennes (argiles de Saint-Jean-la-Poterie, sables roux).

Les formations redoniennes se trouvent à des altitudes élevées par rapport au marais actuel : 90 mètres à Allaire, jusqu'à 120 mètres pour les plus élevées aux environs de Lohéac. L'altitude moyenne des dépôts redoniens se situe à 40 mètres. Il faut imaginer les paysages redoniens comme une mer envahissant profondément les vallées de la Vilaine et de L'Oust avec des îles constituées par les buttes d'Aucfer, de Beaumont, de Bellevue, de la Ruche, etc...

Ère Quaternaire

                                    C'est sur le schéma hydrographique de la fin du tertiaire que s'organisent au quaternaire (- 2 Ma à nos jours) les Marais de Redon et de Vilaine.

Les  Périodes  Glaciaires.

Une période glaciaire est marquée par la glaciation de grandes quantités d'eaux. Ces glaces, immobilisant l'eau, recouvrent alors de grandes surfaces continentales, entraînant un abaissement important du niveau des océans. Les mers se retirent, dégageant de nouvelles zones continentales, c'est la régression. Inversement la période interglaciaire est marquée par la fonte des glaces, ce qui entraîne l'élévation des niveaux des océans. Les mers avancent sur les continents, c'est la transgression. L'abaissement du niveau des océans réactive l'érosion, les cours d'eau voient leurs pentes accentuées et ils recreusent leurs vallées. L'élévation du niveau des eaux marines marquant une transgression, entraîne un envahissement des vallées des cours d'eaux par la mer, ce qui favorise la sédimentation marine.

Au cours du quaternaire, 5 grandes glaciations (Donau, Gunz, Mindel, Riss, Wurm) se succèdent, suivies par 5 phases interglaciaires. Ce sont ainsi 5 grandes régressions, chacune suivie par une transgression, qui se sont succédées dans le monde. La dernière, la transgression flandrienne qui s'est poursuivie dans les temps historiques, fut particulièrement importante.

Les phases glaciaires et interglaciaires ne sont pas linéaires. Ainsi, pendant les phases glaciaires, il y a des périodes de réchauffement. A l'inverse, pendant les phases interglaciaires, il y a des périodes de refroidissement. Pendant les glaciations, la calotte polaire nord descendait jusqu'au sud de l'Angleterre et le Massif armoricain se trouvait dans la situation climatique actuelle du nord de la Sibérie. Il en résultait que la plupart des cours d'eaux étaient gelés et leurs vallées comportaient des glaciers. Une telle vallée glaciaire fossile est encore visible dans les virages au dessus du village "Le Poteau", sur la route allant de Redon à Péaule.

Sédimentation et Érosion

                                                  Les Marais de Redon et de Vilaine sont donc le résultat d'importants phénomènes de sédimentation et d'érosion dont les origines sont variables. Les traces de ces fluctuations, au cours du quaternaire, sont visibles dans les dépôts alluvionnaires et marins[7] bordant le marais ou formant son plancher. Sur le bord du marais, on trouve des terrasses alluviales récentes et anciennes qui témoignent des changements de niveaux de la mer et de la Vilaine. Ce sont ainsi 5 phases de sédimentation suivies par 4 phases d'érosion qui se sont succédées.

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 Première phase de sédimentation :

Des terrasses anciennes  de Rangoulas et de Rieux, atteignant une altitude de + 27 à + 33 mètres, montrent que la Vilaine et l'Oust ont atteint au moins ce niveau et déposé des sédiments.

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 Première phase de creusement :

 

Ces terrasses sont bien distinctes des plus récentes, démontrant que le niveau des deux cours d'eaux a baissé entre les deux séries de terrasses. Les premières terrasses ont été creusées grâce à l'abaissement du niveau de la mer.

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 Deuxième phase de sédimentation:

 

Formation de nouvelles terrasses  atteignant pratiquement les altitudes des précédentes. Terrasses de Saint-Nicolas-de-Redon, de La Provostaie, du Val à Redon, de Saint-Perreux, de Beaumont, etc... L'Oust et la Vilaine ont sédimenté jusqu'au niveau 25 à 30 m.

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Deuxième phase de creusement :

Cette phase marque la séparation des terrasses.

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 Troisième phase de sédimentation :

Cette phase se caractérise par l'élévation du niveau marin, et par le dépôt de nouvelles terrasses. L'altitude de celles-ci est moins élevée que celle des    précédentes, seulement 15 mètres au maximum. Terrasses de l'Arz à Saint-Vincent-sur-Oust, de Gannedel, de Sainte-Marie, etc...

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Troisième phase de creusement et quatrième phase de sédimentation :

Élévation du niveau marin et dépôts de nouvelles terrasses. Terrasses d'Aucfer et du Val en Rieux, du port de Redon, de Cran.

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Quatrième phase de creusement et cinquième phase de sédimentation :

Élévation du niveau mais, cette fois, les dépôts sont des dépôts marins et correspondent à la transgression flandrienne. Ce sont les dépôts qui constituent le fond du marais actuel. Ils atteignent jusqu'à 20 mètres d'épaisseur et leur altitude varie de -16 mètres à + 4 mètres.

 

Âge des Marais.

                                    Dans les vallées de la Vilaine, de l'Oust et de leurs affluents, le niveau d'eau est fluctuant sur des périodes courtes. Une étude des sédiments flandriens des Marais de Redon montre que ces marais n'ont de véritable existence que depuis 7.000 ans. Pendant la dernière glaciation, celle du Wurm, qui atteignit son apogée il y a 20.000 ans et se termina il y a 12.000 ans, la vallée de la Vilaine était probablement occupée par un glacier. Avec le réchauffement climatique postglaciaire, ce glacier a fondu, dégageant une vallée à fond large et plat, en forme de U, dont les pentes abruptes se sont creusées dans les moraines latérales, qui ont été déposées par les différentes glaciations précédentes et remaniées en terrasses alluviales par les transgressions interglaciaires. Après le Wurm, la première transgression a entraîné une montée du niveau de la mer. Il est passé, en 4.000 ans pour les hautes marées, du niveau - 12 mètres à - 2 mètres. La rencontre des eaux douces et des eaux marines provoquent la floculation des alluvions. Le fond de la vallée est occupé de plus en plus largement par des sédiments marins. Il se forme aussi une crête sédimentaire proche du lit de la Vilaine et de ses affluents. Ce cordon contribue à retenir l'eau dans les marais ou dans certaines dépressions. On peut d'ailleurs observer aujourd'hui que les terrains situés en bordure de Vilaine ou des affluents sont plus hauts.  Au niveau de Redon, l'Oust et la Vilaine se jettent dans un bras de mer.

Suit une période de stagnation, où le niveau de sédimentation ne varie que de 2 mètres en 2.500 ans. Probablement à cette époque (de - 3000 à - 500), la région de Redon était assez marécageuse. A la fin de cette période, le niveau zéro devait être 4 à 5 mètres sous le niveau actuel. Les vallées de la Vilaine et de l'Oust présentaient l'aspect des rias[8] actuelles à marée basse, larges lits avec des bancs de vase. Le niveau des sédiments était 8 mètres sous l'actuel.

Aspect  Actuel.

                                                  Une deuxième transgression brutale dépose 8 mètres de sédiments en 1.500 ans. Elle s'est produite sur les périodes historiques et s'est arrêtée au début du XIVeme siècle.  Depuis, le niveau de la mer semble s'abaisser. Le niveau de sédimentation a baissé du niveau 8 mètres au niveau 4 mètres au dessus du niveau zéro des cartes maritimes, ce qui signifie qu'avant le barrage d'Arzal, les marais n'étaient recouverts que par les marées de forts coefficients.

Il faut garder à l'esprit que le fond de vallée sur lequel se font les transgressions étant plat, les sédiments successifs s'accumulent les uns sur les autres. Le niveau de la mer montant, il y a peu de changement d'aspect dans la mesure où la sédimentation suit la montée océanique. Il y a, par conséquence, maintien d'une hauteur moyenne d'eau recouvrant les marais. A certaines époques, les fluctuations donnaient probablement à ces marais l'aspect des rias  actuelles avec des bancs de sables et de vases, colonisés pour certains par des plantes halophiles, [9] mais tous recouverts par les marées hautes d'équinoxe. A d'autres périodes, ils prenaient l'aspect des marais actuels, prairies submergées parfois par les marées hautes de plus forts coefficients mais inondées fréquemment à chaque crue de la Vilaine et de l'Oust.

La dernière transgression s'est terminée vers 1300. Un parchemin de 1543 montre qu'à l'aval de Redon, le marais a pratiquement son aspect actuel.

Qu'en était-il au temps de Nominoë et Saint Conwoïon, c'est-à-dire au IXeme siècle ? Nous constatons, sur la courbe de sédimentation, que le niveau était à environ 5,5 mètres, plus d'un mètre au dessus du niveau actuel. Le paysage du marais n'était pas le même qu'aujourd'hui, le maximum de sédimentation n'avait pas encore été atteint. Donc, les zones qui sont aujourd'hui toujours hors d'eau même en période d'inondation, n'existaient pas à cette époque et les marais devaient être plus largement inondés en période de grandes marées et d'inondations. Comme à l'époque la sédimentation était plutôt marine, on peut penser que le marais était occupé par un bras de mer et que la traversée de ce marais ne pouvait se faire qu'en bateau au niveau de Redon

L’Île  aux  PIES.

 

Géologie.

Toute [10]la partie basse du site est occupée par des alluvions modernes argilo-sableuses, surmontant schistes et arkoses [11] de Bains-sur-Oust. Cette partie était autrefois régulièrement inondée ; les alluvions déposées en couche importante en font une zone fertile quand elle est assainie. La partie élevée correspond au granité feuilleté de Lanvaux. L'Oust a percé cette barrière est - ouest pour former la cluse ou la gorge de l'Ile-aux-Pies. Cette cluse a donc donné naissance à de vertigineuses falaises de plusieurs mètres de haut utilisées par les écoles d'escalade.

Il est intéressant de se pencher sur la naissance de la cluse en émettant une hypothèse de formation en trois périodes :

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 1ère époque :

La barre granitique des Landes de Lanvaux a été cassée par les mouvements d'ensemble de l'Armorique. La rivière s'écoule vers le sud.

 

 

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  2ème époque

Le Massif Armoricain, dans la région, a été soulevé en basculant vers le sud. La rivière a creusé sa vallée en déblayant les débris de la faille.

 

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 3ème époque

La cluse formée donne l'illusion que la rivière a coupé en deux l'obstacle formé par le massif granitique. En réalité, elle n'a fait que profiter d'une brèche et l'agrandir. En amont, le ralentissement de l'écoulement a entraîné la formation du marais et des îles.

 

État Actuel.

                                             L’Oust dans sa course vers la mer a su trouver des failles dans la barrière de granité de Lanvaux et a dégagé son chemin par une cassure spectaculaire dans les collines, à savoir une gorge. Le Vieil Oust correspondant à la partie en amont de la cluse connaît un environnement exceptionnel.

Pour ce qui concerne le canal achevé en 1855 pour la partie longeant la Commune, ses berges ont été plantées de milliers d'arbres dans le but de stabiliser les berges et les levées. Les roseaux, les joncs et autres plantes semi-aquatiques jouent le rôle d'amortisseurs naturels au ressac provoqué par les bateaux et protègent les berges par rapport à l'érosion. Cependant, l'Oust n'est canalisé que du barrage de la Potinais à l'écluse de la Maclais.

Nous pouvons établir des changements qu'ont connu le site de l'Ile aux Pies et du Mortier de Glénac grâce au cadastre napoléonien que l'on peut comparer à celui actuel.

Au milieu du XIXème siècle, on constate que le site de l'Ile-aux-Pies se divise en une multitude de petites parcelles laniérées.

CADASTRE NAPOLEONIEN DU MORTIER

 Une évolution importante est à noter : il s'agit de la partie droite du site qui a été remembrée, le remembrement ayant pris fin en 1974 sur la commune. Avant le remembrement, les terres de cette partie étaient réparties en une multitude de petites parcelles de très petite largeur clôturée, jusque dans l'eau. L'entretien de ces parcelles ne pouvait que se faire à la main. Il était impossible d'y faire entrer une charrette et encore moins une machine agricole. Seule la brouette pouvait être utilisée. Ainsi toute personne non propriétaire d'une parcelle longeant le bord de l'Oust et surtout du Rio de la Borde ne pouvait approcher de l'eau. Cette partie ainsi remembrée représente un intérêt touristique car elle comprend d'une part le camping municipal construit dans les années 1970, la prairie et la plage.

            La partie concernant le belvédère ne représente, quant à elle, aucun intérêt si ce n'est celui de point de vue exceptionnel. Cette partie ne peut être utilisée ni comme pâture ni comme terre de cultures en raison d'un sol pauvre et de problèmes d'accessibilité. Cependant, ce site était utilisé autrefois par les autochtones pour leurs animaux en tant que pacage et zone de litière et de foin. De plus, le cadastre actuel conserve comme chemins d'accès au belvédère les limites des parcelles du cadastre napoléonien. Ces limites parcellaires ont été donc transformées en chemins de remembrement.

L'autre approche d'une évolution peut se faire grâce aux photos aériennes, sources plus importantes d'informations étant donné qu'elles fournissent quelques précisions sur le type de végétation présente sur le site.

Une photo du début des années 1960 et une autre de la fin des années 1970 montrent des changements notables dans le paysage du site. Ces photos, prises à presque  20 ans d'intervalle, permettent ainsi de faire l'état des lieux avant et après le remembrement. Le remembrement et ses conséquences, l'envasement et l'extension forestière sont les trois faits marquants ressortant de l'étude de ces photos aériennes.

Le phénomène le plus patent est l'envasement. On a donc affaire à un site mobile. Les zones d'extension de l'envasement entre 1961 et 1978 sont le nord de l'île de Bourreu  et le Mortier  de Glénac. Les bancs de vase au début des années 1960 forment, à la fin des années 1970, des îlots, comme par exemple celui au nord de l'Ile-aux-Geais. Mais certains îlots ont disparu du fait de l'invasion des ragondins minant par leurs terriers la base de ces îlots. Ceci a pour conséquence que la végétation installée meurt, en particulier les arbres indispensables à l'existence de l'île puisque, grâce à leurs racines, ils maintiennent la vase. Pour la partie concernant le marais, on constate qu'en 1961, le cours du Vieil Oust, c'est-à-dire celui non canalisé, est très diffus contrairement à la fin des années 1970 où le cours de l'Oust est très bien délimité. Ainsi le cours de l'Oust se réduit par l'envasement qui forme des terres émergentes sur lesquelles s'installe la végétation telle que les saules. Donc les étendues d'eau libres diminuent fortement. Il en est de même pour la surface du marais. Il s'agit pour l'essentiel d'un manque d'entretien venu du changement des modes de culture et de l'évolution du monde agricole.

Outre l'envasement, on remarque l'extension de la végétation. Les coteaux de Saint-Vincent, occupés traditionnellement par de petites parcelles cultivées, sont couverts de conifères. La lande boisée s'est développée tout au long de l'Oust surtout entre le barrage de la Potinais et l'écluse de la Maclais et sur sa rive droite. On assiste à l'embocagement du site puisqu'il n'y avait aucun arbre, il y a quelques années. En outre, l'utilisation de faucheuses manuelles permettait aux paysans de couper les foins sur les bords de l'île de Bourreu, ce que les machines, actuellement, ne peuvent faire, d'où le boisement de pourtour de cette île constaté entre 1961 et 1978.

Le remembrement, achevé en 1974 sur la commune, a modifié l'image du site. Aux petites parcelles des années 1960 ont succédé de grandes parcelles sauf pour la partie concernant le rocher. On retrouve, en 1961 le long du Rio de la Borde, de toutes petites parcelles, séparées par des rangées de palis. De plus, on remarque que Bourreu, occupée par des prés-marais non délimités en 1961, a été assainie et utilisée comme prairie artificielle pour la culture du maïs en 1978.

Quant au marais, né de la rencontre du mascaret([12]et des crues hivernales, il est actuellement en voie d'assèchement depuis la construction du barrage d'Arzal en 1965, destiné à réduire le mouvement des marées afin de faciliter l'évacuation des eaux de la Vilaine pendant les périodes de crues. Ce barrage avait pour but d'être une réserve d'eau potable pour la population comprise entre Auray et Saint-Nazaire mais aussi de faciliter la navigation commerciale et le tourisme fluvial. Mais ce barrage d'Arzal, bien qu'il soit bénéfique pour beaucoup, entraîne un dessèchement du Mortier de Glénac qui devient une vraie tourbière au confluent de l'Aff et de l'Oust, ce qui a pour conséquence une diminution du gibier mais aussi la disparition de plantes caractéristiques des milieux marécageux.

En somme, le site de l'Ile-aux-Pies n'a pu qu'être un lieu privilégié pour l'usage des hommes tant par la présence de l'Oust que par celles des marais. L'évolution paysagère marque une évolution dans l'utilisation même du site. A chaque type d'utilisation correspond un paysage.

SAUVEGARDE  du  SITE  de l’ÎLE  aux  PIES  et  du  MORTIER

 Au[13] terme de cette étude, on constate que l'aménagement le plus urgent à réaliser est la réhabilitation des marais du Mortier de Glénac. En effet, il est nécessaire de sauvegarder ces marais sans quoi le site de l'Ile aux Pies perdrait une partie de son charme et de sa réputation de site naturel exceptionnel. Il va de soi que la réhabilitation du marais, l'augmentation des zones d'eaux libres représentent un coût financier qu'une commune ne peut seule prendre à sa charge. L'association des communes concernées par le marais, à savoir Saint-Vincent-sur-Oust, Bains-sur-Oust et Glénac, est indispensable. Il en va de la survie de cette zone en tant que marécage mais aussi de tous les intérêts qu'elle présente. Il s'agit d'intérêts écologiques par la présence d'une faune et d'une flore spécifiques des zones humides, d'intérêts économiques (pêche, chasse, agriculture) et, de plus, touristiques. La descente de l'Aff et de l'Oust est effectuée par de plus en plus de péniches et bateaux de plaisance, descente traversant les marais. Le renouveau du marais renforcerait l'intérêt touristique d'une croisière sur l'Aff et l'Oust.

D'autre part, l'aménagement du «Rocher» ou encore du belvédère permettrait aux touristes et aux autochtones de tout âge de profiter du point de vue exceptionnel qu'offre ce Rocher. Cet aménagement étant beaucoup moins onéreux que le précédent, il peut donc être réalisé que par un seul acteur et avant la réhabilitation du marais. Cependant, cette réhabilitation n'est pas à négliger car elle permettrait d'améliorer la qualité du point de vue offert par le Rocher. Elle serait en quelque sorte un retour en arrière au temps du Prince Waroch, de Nominoë qui décrivait ces marais perfides grâce auxquels ils remportèrent leur bataille. Il serait intéressant de relater ces batailles mais aussi l'usage que l'on avait du site à travers des panneaux constitués dans la roche même et installés tout au long du chemin d'ascension du Rocher. On associerait ainsi à la splendeur du site son histoire.

En somme, l'aménagement léger du Rocher, c'est à dire sa mise en valeur, sera d'autant plus profitable si elle est suivie de la réhabilitation des marais du Mortier de Glénac, ce qui, il est vrai, représente un poids financier non négligeable.

SORTIE des MARAIS vers l'ILE aux PIES


 

 


[1] Magré Gérard

[2] Rapports conseil général 1880 aout

[3] Ce sont des plantes aquatiques, fixées dans la vase, avec ou sans feuilles flottantes. Les fleurs forment des épis qui émergent généralement. Elles ont quatre étamines et quatre ovaires.

[4] Marais de Redon

[5] Chaîne Cadomienne : chaîne de montagne qui s'est développée à la fin des temps précambriens en Europe médiane et dont des témoins subsistent dans le Massif Armoricain (Basse Normandie, Bretagne nord: du Trégor à la baie du Mont St Michel).

[6] Le Briovérien est une époque géologique du Néoprotérozoïque, spécifique à la géologie du massif armoricain, qui s'étend de -670 ma à -540 ma. Il tire son nom de la ville de Saint-Lô, Briovera en latin. Cette époque recoupe l'Édiacarien et le Cryogénien, et est immédiatement suivie par le Cambrien.

 

[7] Dépôts Marins : sédiments généralement constitués  de vases très argileuses parfois limoneuses, dépourvues de calcaire

Alluvions fluviatiles : plus grosses que les vases estuariennes et proviennent des grès, des quartzites et des schistes

[8] Un aber (mot celtique signifiant estuaire) ou une ria (mot galicien) est une vallée de fleuve envahie par la mer. La géographie internationale utilise le mot ria ; mais le mot breton aber est aussi utilisé.

[9] Plante halophile est une plante adaptée aux milieux salés 

[10] Annales de l’A.P.P.H.R 1999

[11] l'arkose est une roche détritique riche en quartz, mais il a comme originalité d'être un grès grossier, feldspathique. Par ailleurs son liant est argileux, et non calcaire, ce qui augmente sa résistance dans le temps à la pluie.

[12] Les eaux maritimes remontaient la Vilaine formant un véritable courant jusqu’aux marais 

[13] Annales de l’A.P.P.H.R 1999

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