VIE  dans  les  MARAIS

  

La  Pêche.  La Chasse - Les Lavandières - La Vie Quotidienne

Histoire de Pêcheurs-Dangers - Légendes

Droits de Pêche.

Droit des Seigneurs de Rieux. [1]

                                      "Le Seigneur de Rieux avait maîtrise des eaux dans toute leur étendue, avec droit prohibitif de chasse à toutes bêtes. Le tout appartenant au dit Sr de Rieux avec droit d’écluse et pêche sur la rivière d’Out et de l’Arz depuis les écluses de Drays jusqu’aux ponts de Rieux, les communs de la rivière d’Oust et de l’Aff en la paroisse de Glénac".

Adjudication Droit de Pêche en 1884[2]

 

Adjudication Droit de Pêche en 1884[

 

LES TECHNIQUES  DE  PECHE

 La Fouine

La fouine est une fourche aux dents aplanies, espacées de quelques millimètres, fabriquée par le forgeron de la commune. Elle est utilisée principalement en l'enfonçant au hasard dans la vase à partir d'un bateau ou du bord de la rivière pour prendre des anguilles et parfois d'autres poissons de vase comme la tanche. Son utilisation est particulièrement importante dans les marais permanents au pied des coteaux de la Vilaine, à Rieux et dans les vallées de l'Oust, de l'Arz et de l'Isac. Elle est peu utilisée en Vilaine, car elle nécessite obligatoirement l'emploi d'une embarcation. Cette pêche est souvent pratiquée le dimanche et parfois par des femmes. La concentration des anguilles dans les trous d'eau en fin d'année occasionne des captures importantes à la fouine.

Le Carrelet

Pêche au Carrelet

   

                        Le carrelet est un filet carré tendu par quatre perches que l'on immerge horizontalement et que le pêcheur relève après quelques minutes d'attente.

Il en existe trois types différents

·        le carrelet "porté",

·        le carrelet fixé sur bateau,

·        le carrelet fixé au bord

Le carrelet "porté" est le plus courant et le plus utilisé, essentiellement en rivière. De petite taille, il est composé d'un filet carré de deux ou trois mètres de côté tendu par quatre perches de châtaignier appelé "allernes" ou "quenouilles". Ces quatre bras sont unis à leur extrémité par une pièce carrée de 20 par 20 : la "tête de mort" ou "tête de carrelet". Ce bois est fixé par un lien à l'extrémité d'une grande perche de trois à quatre mètres que constitue le mât, en haut duquel une corde de quatre à cinq mètres est nouée. La base du mât est traversée par une barre de bois qui l'empêche de s'enfoncer dans la vase. Le pêcheur installe son carrelet en bordure de l'eau. Il descend parfois sur les parties solides dans le lit de la rivière. La base du mât est plantée dans la vase. Le pêcheur laisse descendre progressivement le filet dans l'eau. Pour le relever, il tire sur la corde tout en posant le pied sur la barre de bois fixée à la base du mât pour faire l'appui.

Carlet Porté

                                  Sur l'Arz, un carrelet "porté" de taille plus réduite, probablement en raison de la faible largeur de la rivière est utilisé sans corde. Pour le relever, le pêcheur tire directement sur le mât.

Le carrelet fixé sur bateau est généralement de grand taille (quatre mètres). Il est installé sur le côté d'un bateau, dont l'avant et l'arrière sont droits et relevés pour offrir une plus grande surface en contact avec l'eau et éviter le renversement de l'embarcation par le poids du carrelet. Les modèles les plus récents sont installés à l'arrière du bateau et sont relevés à l'aide d'un treuil.

Le carrelet fixé au sol est principalement utilisé dans l'avant-port de Redon. De grande taille, il est relevé par un treuil à manivelle. Le carrelet permet la capture de toutes espèces de poissons.

Pêche à la Trouille

 La Trouille

                            La trouille est une sorte de grande épuisette d'un diamètre variant d'1 m à plus d'1 m 50.

 Réalisée avec un cercle de bois, un manche et une poche faite en filet de carrelet, en grillage ou en toile de jute. Elle est parfois fabriquée en demi-cercle avec un manche pivotant permettant ainsi de la tenir d'un côté ou de l'autre de la douve. Deux personnes au minimum sont nécessaires pour pratiquer cette pêche. L'une place l'appareil dans la douve et le tient par le manche. Et l'autre agite l'eau un peu plus loin pour effrayer le poisson avec une perche au bout de laquelle un disque de bois en pin de 20 cm environ est encastré.

Pêche le Gâni

Le Gâni

                       C'est un demi-cylindre en grillage d'une longueur qui varie en fonction de la largeur des douves, généralement 2 m sur 0,80 m de large. L'ustensile se place sur la vase. Le pêcheur descend dans l'eau pour piétiner le fond et ainsi, faire se dévaser les anguilles. Il relève régulièrement le gâni pour prendre le poisson. Cette technique de pêche  s'emploie aussi dans les petites douves à Rieux avec un panier d'osier ordinaire.

Le tarissement des douves[3]

 

"On vo tarir ! C'est ce qu'on se disait autrefois quand on allait vider les douves" (Théhillac). Cette technique de pêche, qui se pratique le dimanche, consiste à isoler un bout de la douve en fin d'été lorsqu'il n'y a plus beaucoup d'eau. Pour se faire, des hommes généralement deux à quatre, construisent de petits barrages en terre, espacés d'une dizaine de mètres au maximum, puis avec des seaux vident l'eau de la portion ainsi isolée. L'eau évacuée, ils récupèrent tanches et anguilles. Cette pêche se pratique sur les marais de la Vilaine maritime qui s'assèchent plus facilement en été.

Pêche à la Cage

 

 

La Pêche à la Cage

                                           En été, les carpes et les tanches viennent frayer dans les lieux peu profonds et ne sont pas farouches à cette époque. Les pêcheurs utilisent pour les capturer, soit des cages conçues spécialement à cet effet, soit des cages à foin, genre de grand panier à tout faire en osier (transport du foin, des canards...). Les cages à carpes en grillage ou en filet sont de dimension variable et généralement coniques, de 1 à 2 mètres de diamètre à la base et 0,50 à 1 mètre en haut. Elles sont suspendues à une perche et peuvent également être lancées. Leur utilisation se fait à partir d'une barque ou directement les pieds dans l'eau.

Le Pique

La pêche au pique se pratique dans les mêmes conditions que la pêche à la cage. Pour capturer le poisson, le pêcheur utilise un harpon de fabrication artisanal, constitué de 7 à 8 dents soudées et fixées à un manche de bois. Ce matériel ne semble avoir été utilisé que sur la vallée de l'Isac. Ailleurs, le pique a parfois été remplacé par une fourche à foin.

Pêche à la Talmoche

 

La Bignée ou Talmoche

                                 Des vers de terre, enfilés sur une ficelle fine d'une longueur environ 1 m sont regroupés et attachés en pelote pour former la "beuguée". Ces vers sont liés à un fil et constituent une ligne. Un plomb conique sous la beuguée assure la tension du fil. Par un mouvement de "monte et baisse" régulier, le pêcheur agite l'appât. Les anguilles mordent, avalent les vers et la ficelle. Le pêcheur les sort de l'eau rapidement sans qu'elles ne décrochent. La bignée se pratique en bateau, les anguilles tombent alors directement dans l'embarcation, ou du bord et dans ce cas, un parapluie, parfois un bassin en cuivre, flotte sur l'eau. Les anguilles y sont déposées. Cette pêche est très pratiquée notamment le dimanche.

 

Le Havenais ou Haveneau

                                                    Le havenais est un filet triangulaire tendu sur deux côtés sur deux perches de châtaignier et sur le troisième à une corde. Ce matériel est utilisé en barque. Le pêcheur tient le havenais par les perches du côté où elles se croisent et immerge l'autre extrémité. En faisant levier sur le bord du bateau, il lève le filet pour capturer le poisson. Le havenais était principalement utilisé sur l'Oust et un peu sur la Vilaine.

La Pêche à la Ligne

                                           Elle est essentiellement pratiquée par les habitants des bourgades. Elle est considérée comme peu avantageuse par les ruraux. Elle est remplacée par d'autres techniques. D'autre part, le balancement des marées n'est pas favorable à cette pratique dans la zone étudiée.

La Pêche à la Grenouille

                                             La grenouille est pêchée avec une ligne constituée d'un fil au bout duquel est accroché un morceau de laine rouge et un hameçon ou une aiguille tordue. La grenouille est peu recherchée.  Seuls quelques professionnels la pèchent en vue d'une commercialisation. La population des campagnes la consomme peu. La pêche à la grenouille est une activité des enfants au marais.

La Gône et la Nasse

                                             Utilisée pour la pêche de poisson autre que l'anguille, la gône est une nasse en osier qui peut mesurer plus de 1,20 m de longueur. Le poisson y entre par une extrémité en entonnoir et reste prisonnier. Ce matériel, dès les années 30, a été remplacé par la nasse en grillage. Il est utilisé sur l'ensemble de la zone étudiée, mais plus particulièrement dans les marais permanents,

Pêche à la Bosselle

 

La Bosselle

                                 La bosselle est une nasse rigide en osier, en ronce ou en églantier. Elle est destinée à la capture des anguilles. Il en existe de plusieurs tailles : les petites sont exclusivement destinées à la décoration, les moyennes (les plus courantes) sont utilisées en période de basses eaux et les grosses sont placées derrière les bouchots de pêche et sont munies de « heurtes » (sorte de grands entonnoirs rigides destinés à diriger les anguilles vers la nasse) en période de fortes eaux.

L'ouverture de la nasse est placée dans le sens inverse du courant car celui-ci porte l'odeur des appâts. On appâte la bosselle avec de gros vers appelés « bousards ». Ces derniers ont été préalablement enfilés sur une « ambruse » (fil de fer garni de vers, introduit dans le corps de la nasse). L'anguille ainsi attirée, remonte le courant et pénètre dans la nasse au travers d'un premier goulet, puis d'un deuxième. Elle se trouve alors dans l'impossibilité de rebrousser chemin car elle « se pique le nez » sur la partie la plus étranglée du goulet. La voilà prise au piège. Le pêcheur retire sa pêche en enlevant le « tapin » (bouchon de bois) qui se situe à l'autre extrémité de sa nasse.

La Louve ou Tambour

                                 La louve est un engin cylindrique, en filet de mailles de 27 mm. Trois cercles et trois baguettes de bois amovibles forment l'ossature. Elle est démontable. Le poisson, brochet, tanche a la possibilité de pénétrer par les deux extrémités. Ce matériel a été utilisé dans les vallées de l'Isac et de l'Arz.

Pêche au  Reil

  Le Reil

                                 Le Reil est une nasse en filet de plus de deux mètres de long. Il s'installe dans les douves, fixé dans la vase, côté entrée par un arceau et à l'autre extrémité par un piquet de bois. Le filet est d'une maille de 10 mm pour les anguilles et de 27 mm pour les autres poissons ; il est utilisé sur l'Arz et l'Oust.

Pêche au Fagot

Le Fagot

                                 La technique consiste à faire des fagots de bois liés aux deux extrémités. Un piquet est enfoncé dans le milieu du fagot pour le maintenir au fond de l'eau. Le lendemain, le pêcheur enlève le piquet délicatement et remonte le fagot à la surface. Rapidement, il l'embarque dans son bateau pour en faire sortir les anguilles. Cette pêche archaïque a été utilisée sur l'Arz.

La Teuzelle

Ce matériel est exclusivement utilisé pour la pêche aux anguilles d'avalaison. Il se place en période de crue. II est constitué d'un réservoir appelé "bouton" où le poisson reste prisonnier et de deux ailes fixées au "bouton" qui canalise le poisson. Le bouton, autrefois en clisse de châtaignier, a ensuite été réalisé en grillage puis en filet. La teuzelle est utilisée sur l'Oust, l'Arz et l'Isac.

Les Nasses en Grillage

Poissons Pêchés

 

Les Anguilles[4]

                                 "C'était l'anguille qu'on péchait principalement. On allait à la talmoche le soir". Les quantités d'anguilles pêchées sont considérables :

*      " au carrelet, on pouvait  prendre  120 kg en une heure"

*      "on ramenait 100 kg d'anguilles tous les matins"

*      «  dans une journée ou pouvait prendre 80 kg d'anguilles dans une seule bosselle » 

L'anguille est pêchée toute l'année, mais les techniques de pêche diffèrent suivant les saisons. L'anguille est classée par les riverains des marais comme une espèce particulière. Le terme de poisson lui est rarement attribué : "le poisson, on le vendait pas, on le donnait, l'anguille, on la vendait"

De plus, la métamorphose de l'anguille jaune en anguille d'avalaison est peu connue. Il est courant d'entendre qu'il existe deux espèces d'anguilles

v  le garciau ou vent' jaun, anguille sédentaire à ventre jaune (Glénac)

v  "l'anguille" que l'on prend à partir des premières crues d'automne, dite anguille franche ou bleue.

 

Brochets,  Tanches et Carpes

                                 Le brochet, la tanche, la carpe, sont les poissons d'eau douce les plus couramment péchés. Ils sont très abondants :

 "on pouvait prendre 30 brochets en une heure"

Y'avait beaucoup de brochets, on ne s'occupait pas de la taille. On le mangeait à la poêle avec un litre de cidre sur la table

Ils sont péchés toute l'année dans les vallées affluentes, mais aussi en Vilaine à partir des crues d'automne, jusqu'à la fin du printemps. En été, l'eau de mer, peu diluée compte tenu du faible apport d'eau douce, augmente la salinité. "En hiver, il y avait beaucoup d'eau douce à descendre. L'eau salée ne remontait pas, mais au printemps, l'eau salée gagnait et les poissons d'eau douce se sauvaient devant"

 

LA CONSOMMATION DU  POISSON

                                 Pour les riverains du marais, le poisson, et principalement l'anguille, est un aliment de base au même titre que le porc et le sarrazin. Pour manger du poisson, il suffit de le décider: on relève les nasses, on prend la fouine, le carrelet, on puise dans les stocks du boitreau ou du pot d'anguilles salées,

 "les gens mangeaient du poisson quand ils voulaient"

"On mangeait du poisson toutes les semaines "

"On en mangeait (de l'anguille) des fois plusieurs fois de rang"

"Tout le monde mangeait de l'anguille, certains en mangeaient tous les jours".

  L'espèce la plus recherchée est l'anguille, sous sa forme anguille ou "garciau" (anguille sédentaire à ventre jaune). Elle est le plus souvent consommée fraîche. Plus particulièrement sur les vallées de l'Oust, de l'Arz et de l'Isac, elles sont salées dans des pots et des charniers ou fumées pour leur donner une saveur particulière et les conserver.

L'anguille, pour la conserver, on la salait, pas les garciaux, dans des pots en grès, tout le monde faisait "ça". Certains les gardaient (les anguilles salées) trois ou quatre mois, fallait les faire dessaler comme la morue.

 A partir de novembre, on salait les anguilles, on les nettoyait avec de la paille ou de la cendre pour enlever la peau gluante, ça s'appelait l'émorchée, on ne les vidait pas, on les enroulait dans un pot en grès, tête et queue. Une couche d'anguilles, une couche de sel, on pouvait les garder trois à quatre mois. Ensuite, on les mettait sur le grille, on mangeait tout sauf l'arête

 

Epluchage des Anguilles

                                  On les vidait le jour où on les mangeait. Le fumage des anguilles est minutieux. Il existe plusieurs techniques.

Voici celle d'un pêcheur de Redon. "J'ai fumé les anguilles, c'est tout un art, avec un couteau qui coupe bien, on coupe près du nez, on retourne la peau délicatement, ne pas la déchirer au nombril. Arrivé en bas, on la vide, on l'essuie bien, du poivre, du sel, et on remonte la peau. Au niveau du nombril et de la tête, on met un papier de cigarette pour bien colmater les orifices pour éviter que l'air n'y pénètre. On la met dans la cheminée, la tête en bas à fumer sur un petit feu."

                                 Les anguilles sont conservées également vivantes dans des boitreaux, grandes caisses en bois, percées de petits trous, que l'on immerge dans les douves. A Saint-Perreux, des barriques percées et équipées d'une petite porte ont cette fonction. Les anguilles peuvent ainsi être conservées près de deux mois.

                                 Les autres poissons sont consommés frais, généralement cuits au beurre, à la poêle. Certaines espèces sont moins recherchées que d'autres, c'est le cas de la lamproie.

On prenait un peu de lamproies, mais personne n'aime ça.

On prenait des lamproies, mais on les laissait sur le marais, c'était pas bon

Seuls les connaisseurs les apprécient. "Les mariniers étaient friands de lamproies" En effet, elles ne sont consommables qu'à une certaine période.

 Alevinage

Le 7 février 1973

 

Alevinage

                                    "L’Aff[5] a été aleviné en blanc à différents endroits de son cours, 1000 kilos de tanche et 40 kilos de gardon vont ainsi repeupler ce cours d’eau, au grand plaisir des membres de la société de pêche et de pisciculture du mortier de Glénac".

 

Chasse sur le Mortier

 

                                 La chasse et la pêche étaient la source exclusive de revenus des habitants de GLENAC avant la Révolution. Autrefois, toute la population riveraine du marais y pratiquait la chasse et la pêche sans permis. On disait que les rivières ayant existé de tout temps, les habitants proches y avaient plus de droit que l'Etat français qui ne donnait pas un centime pour leur entretien sauf pour le canal de Nantes à Brest en raison du passage des bateaux. .

La chasse aux canards est plus courante et elle est privilégiée par le fait que le Mortier est un lieu transitoire dans la migration de ces oiseaux.

 

Canard Colvert

  6 Décembre1890 . Journée mémorable.

                                 "La[6] température que nous subissons depuis quelques jours nous a fait assister  dimanche dernier à un spectacle extraordinaire. La quantité de chasseurs qui toute  la journée se trouvaient postés ce jour-là dans la partie du marais qui d’un côté s’étend : de Quinsignac à Aucfer et de se dernier point au Mortier de Glénac, faisait croire à une opération militaire tant le nombre des coups de fusil se répétait".

Mais il s’agissait de bien autre chose, comme nous le disons plus haut, le froid excessif de ses derniers jours faisait s’abattre sur les Marais une quantité innombrable de gibiers sauvages. Les canards surtout descendaient par milliers. Aussi en est-il résulté un véritable massacre dans leurs rangs. En effet tous les chasseurs de notre contrée s’étaient donné rendez-vous sur le terrain surtout que dans les jours précédents se répandait le bruit de la présence en face le mortier de Glénac d’un groupe de cygnes et dans les parages de Rieux l’apparition d’un aigle aux envergures formidables, qui faisait un véritable carnage parmi les oies qu’on élève par troupeaux dans ce pays. La fin de journée nous a prouvé qu’elle avait été fructueuse, un grand nombre de chasseurs sont rentrés le premier soir avec une ou plusieurs pièces de gibier. Nous n’avons pas vu l’aigle en question mais le lendemain, lundi, notre marché était approvisionné de volatiles sauvages de toutes sortes. Un campagnard y a fait son apparition amenant à lui seul un sac contenant trente- deux canards, non compris ce qu’il a vendu par ailleurs. Cela donnera à nos lecteurs une idée de ce qu’a été la chasse au marais dans la journée de dimanche.

Novembre 1891

 

Corbeau

                                           "  Depuis[7] quatre jours un froid très vif se fait sentir, amenant avec lui les signes précurseurs d'un hiver rigoureux . On remarquait en effet jeudi matin à l'aube, passant au-dessus du clocher de notre ville une volée de 6 00  à 700 corbeaux qui tous allèrent s'abattre sur un même point choisissant les hauteurs de la Roche du Theil, les rochers de Bougreau , Glénac et tout le voisinage, sans doute pour hiverner dans ces parages. Les campagnards sont désolés de voir une telle quantité de carnassiers envahir leur contrée, car généralement ces oiseaux dont il est difficile de se débarrasser ravagent leurs champs.

                                 Nous croyons cependant leur assurer que l’autorisation de les détruire au moyen d'armes à feu est assez facilement accordée : une demande écrite adressée à la mairie de sa commune suffit pour celui qui n'a, pas de permis de chasse".

 

 

La Vie Quotidienne

 

 

Vue des Marais

                                 II [8]y a de cela 40 ou 50 ans, le marais de GLÉNAC était une grande mare traversée par des courants d'eau. Des canots, des chalands construits par les artisans du pays, y accostaient le long de ses rives et les lavandières venaient laver leur linge au bord de ses courants. C'est vrai qu'à cause de cette étendue de marais appelée " mortier de Glénac", GLÉNAC était un village de pêcheurs.

Presque chaque famille avait un bateau et pratiquait la même pêche que l'on retrouve dans la Vallée de l'Oust. N'oublions pas la pêche à la "talmoche" qui se pratiquait à la tombée de la nuit, lors des grandes crues (on enfilait les vers de terre sur un fil et l'on attachait ce fil à une petite gaule).

En effet, tous les ans, ces marais étaient inondés et le limon qui s'y déposait était très fertilisant pour le foin.

                                 Fin Juin, début Juillet se pratiquait la fenaison, et après liberté totale pour les vaches et les "patous" Les vaches se rassemblaient en un seul troupeau, après avoir échangé quelques coups de cornes. D'autres aimaient le "yagé" (sorte de jonc) et y passaient des après-midi dans ce mortier où le soir il fallait les déloger en empruntant un bateau. D'autres, plus excellentes nageuses, traversaient pour paître sur ces petits ilot appelés "butteaux", et allaient même jusque sur le marais de St Vincent et rentraient le soir.

Le Marais

 

Quand on gardait les vaches au bord du « Mortier »

 

L'eau (1)a toujours été un élément spécifique du paysage glénacois. Glénac qui doit son origine : la vallée de l'eau. La vallée elle-même ne s'est pas beaucoup modifiée depuis les temps anciens, se contentant de changer de visage suivant les saisons et au gré des crues. Plus esthétique avec ses eaux en hiver, le marais ou « mortier » revêt pour ceux qui le connaissent un aspect bien spécial en été.

Les foins coupés, rasés de prés, les prés ressemblent plutôt à une immense pelouse jaunâtre qui ne demande d'ailleurs qu'à reverdir à la faveur d'une petite ondée.

Depuis les opérations de remembrement, de nombreuses clôtures sont apparues délimitant les diverses parcelles où paissent les vaches désabusées. Peut-être s'ennuient-elles ?

Le temps n'est pas si lointain en effet, où toutes les bêtes (environ 80) du marais se retrouvaient en bandes et circulant librement du « Pré-Viconte » aux « Prés-Chaoues ».

II faut dire que garder les vaches « au marais » était tout un art : il vous suffisait de les laisser « lutter » une bonne fois. Après la bagarre, elles se reconnaissaient « un chef » (souvent une vache assez vieille) et vous pouviez les rentrer tranquillement ! le soir...On retrouvait parfois une corne sur le lieu de la bataille et gare à vos fesses si la corne en question était justement celle de l'une de vos vaches !

Mais ces quelques ennuis étaient vite oubliés et, le troupeau paissant en paix, vous les gardiens, pouviez aussi vaquer à vos occupations c'est-à-dire oublier exactement la raison pour laquelle vous étiez au marais. Résultats : au bout de quelque temps, les bêtes, peut-être fatiguées de l'herbe ou désireuses de vous déranger dans vos jeux allez savoir !. Elles se retrouvaient à brouter les choux ou les « lisettes » dans les champs, elles adoraient aussi les pommes ! ...

Les enfants de même, d'ailleurs. Au moment des dégâts, les gardiens étaient fort occupés à cuire les pommes sous la cendre dans un four habilement construit dans la terre d'une douve ! Ce qu'elles étaient bonnes ! Tous ceux qui en ont dégusté vous le diront. Depuis elles avaient le goût du fruit défendu, puisque chaque gamin savait pertinemment qu'il n'avait aucune permission de chiper les pommes de « loquard » ou de calvin de M. Untel, ou encore de se servir largement au châtaignier voisin.

Mais nous avions largement besoin de tous ces produits, spécialement pour les grandes fêtes de mariages auxquelles tous les enfants du marais jouaient tous les ans. Oh ! l'ambiance était terrible : des déguisements (vêtements et feuilles), des chants que nous reprenions avec entrain. Le plus « braillé » était sûrement « allons voir les marmitons, voir si la soupe est prête. La soupe, c'était pour la chanson. Nous, les gosses, nous en avions horreur. Au menu, vous pouviez avoir “pommes cuites”, poires dérobées à Marianne à la “Guchée”, gâteaux ou bonbons sérieusement économisés depuis plusieurs jours, sucres que notre mère avait laissés à notre portée et comme boisson ? Du vin. Oui, chers parents!... mais continuez de lire : ce vin était de fabrication artisanale : de l'eau que vous puisiez à la rivière (elle n'était pas encore polluée) et des mûres écrasées et mélangées : le tout dans de vieilles bouteilles de sirop récupérées après l'hiver.

 Les Distractions

Pendant ce temps, les "patous" s'amusaient avec des jeux qu'ils fabriquaient eux-mêmes. Des fours creusés le long des douves: pour cuire des pommes, des mûres avec du sucre cuites dans des couvercles de boites de cirage (il n'y avait pas beaucoup de boites de conserves à l'époque) des mûres que l'on écrasait dans des feuilles de châtaigner, des poupées de chiffon pour qui on confectionnait des habits avec des restes de tissu, etc... Pour les garçons, la "pétoire et la "pipette" et les bagarres entre les "ventres jaunes" de Glénac et les "culs pourris" de St Vincent.

Amusement des Enfants

 

Baignade

En été, la rivière est utilisée pour la baignade et, en hiver, le marais gelé est transformé en patinoire. Tous les gosses descendaient pour " puer" sur la glace.

Les dimanches c'était le rendez-vous des familles pour pique-niquer et les promenades le long des rivières qui bordent ce marais.

Il y a une cinquantaine d'années, les hivers étaient plus rigoureux et, le marais gelait, alors c'était des parties de glissade sur la glace. Et puis, le petit monde rural a disparu, les vaches ont été vendues et le remembrement est arrivé et maintenant, il y a peu de crues. Le chenal à été creusé, quelques anciens bateaux résistent encore; mais de plus en plus des bateaux de tourisme accostent à Glénac.

 

Le  Port

  


 

Les Lavandières ou Laveuses

 

Les Lavandières

 

La Lessive Autrefois

 

La Saponière Herbe à savon

 

                                 Quand le savon vient à manquer, les femmes se rendent au bord des ruisseaux ou au pied de quelques talus secs pour y cueillir l'herbe à savon. La saponaire officinale est une plante commune, vivace. Elle fleurit de juin à septembre. Toutes les parties de la plante, même la racine, moussent légèrement, froissées dans l'eau. Cette mousse a un pouvoir détergent connu. Au Moyen Âge, elle était utilisée pour dégraisser la laine des moutons. La plante s'appelait alors « herbe à foulon ». À la même époque, elle était utilisée dans les léproseries pour nettoyer les plaies des lépreux, remplacée plus tard par des bains de soufre. La saponaire officinale s'installe aujourd'hui comme plante ornementale dans les jardins.

Pour Rincer ; Iris et Aunée.

 

Aunée

                             Du temps de la buée, le linge est déposé dans une cuve, sur le dessus une étamine contient la cendre de bois de pommier et quelques feuilles de laurier sauce. L'eau bouillante passée en imprègne les vêtements. Plus tard, on utilise, dans la lessiveuse, des morceaux de racine d'iris des marais ou de l'iris des jardins pour redonner sa fraîcheur au linge.

    Le savon et les détergents (cristaux de soude) remplaceront les cendres, mais il fallait toujours  frotter et taper le linge.

 

La Lessive ou Buée

Quand le linge était très sale, on faisait tremper les couleurs la veille, dans une lessiveuse.

Lessiveuse

Dans celle-ci, on mettait de l’eau, de la lessive, on portait le tout à une température pas trop élevée, on retirait la lessiveuse du feu  puis on mettait les couleurs pour laisser  tremper jusqu’au lendemain.

Ensuite on procédait au frottement du linge.

Pour cela, les laveuses utilisaient une planche sur laquelle elles frottaient le linge et un battoir qui servait à mieux faire, pénétrer le savon dans les fibres des tissus.

                                

Planche à Linge

Caisse et Battoir

 

 Qu'il devait être pénible et usant de rincer et laver le linge à genou, dans une caisse remplie de paille, dans l'humidité et le froid .

Elles frottaient le linge avec du savon et, après, avec une brosse à chiendent .

Toute la matinée, on entendait le bruit des battoirs; quand ,par chance, deux ou trois laveuses travaillaient ensemble, les langues allaient bon train entre deux coups de battoir.

Brosse à Linge

Savon

 

1

Le Linge Blanc à Bouillir

Ensuite pour le blanc, les femmes mettaient sur un feu, sur un trépied, parfois même sur des pierres, une grosse lessiveuse à la carapace toute noire de suie, restes des multiples chauffes précédentes, pleine de linge , d'eau et de lessive, qu'elles portaient à ébullition.

Le linge une fois ,sorti de la lessiveuse ,était rincer plusieurs fois dans l’eau, pour cela les laveuses s’agenouillaient dans leur caisse et lançaient dans l’eau, les grands draps ou linge qu’il fallait tenir d’une main ferme, puis les ramener en tampon sur la planche et les battre à coups redoublés avec le battoir qui faisait sortir la lessive et refaire plusieurs fois ce même geste.

 Ensuite, elles saisissaient, avec une voisine laveuse, le drap par les deux extrémités et le tordaient, en le tire-bouchonnant pour l'essorer.

Après le linge était étendu au soleil sur l'herbe de la place ou des prés, parfois sur de courtes « palisses ». On pouvait aussi le suspendre sur un fil tendu entre deux arbres ou deux grands piquets

Le soir venu, dès lors que ce linge était bien sec, il était chargé sur des brouettes, ramené à la maison et enfin plié sur des chaises.

Deux jours plus tard, les chemises des hommes, les serviettes et mouchoirs étaient repassés. Le reste, sachant que tout avait été "contre plié", ne demandait aucune précaution supplémentaire et était rangé dans les armoires .

Brouette

 

Le domaine des femmes

Le lavoir était le lieu privilégié des rencontres féminines, un peu comme le cellier pour les hommes. Les nouvelles du village circulaient vite et les langues allaient bon train

Les Lavandières au Travail

 

Histoires de  Pêcheurs

Glénac : Mathurin Boudard préfère le saumon

 

 

Mathurin Boudard, 67 ans, est un pêcheur glénacois averti. Depuis sa plus tendre enfance, le « Mortier » de, Glénac, en vieux pêcheur qu'il demeure, n'a plus de secrets pour lui. À partir de quatre ou cinq ans, quand on allait garder les vaches près des marais, on pêchait en même temps avec des moyens de fortune. On allait couper une branche de saule, on recourbait une épingle en guise d'hameçon et le poisson mordait. II faut dire qu'en ce temps-là, c'était plus poissonneux que maintenant. On prenait toutes sortes de, poissons : des anguilles, des tanches, des carpes, des brochets, des sandres, des gardons, des brèmes, des perches, des plies et des saumons que l'on ne trouve plus ici depuis la construction du barrage d'Arzal ; par contre, on trouve maintenant des écrevisses, elles ont dû s'échapper d'un élevage. II y a aussi des grenouilles, mais on ne s'en occupait pas tellement. Au fur et à mesure que l'on grandissait, on a commencé à construire des engins plus ou moins bien faits. On faisait par exemple des tambours (nasses). On a progressé, il fallait que l'on se débrouille. En ce temps là, il était plus toléré que maintenant de pêcher sans permis.

Avec ce que l'on ramenait, on se faisait une petite cagnotte, car à l'époque, les parents ne lâchaient pas l'argent par la fenêtre. On vendait nos poissons à des particuliers qui venaient le chercher de Guer, de La Gacilly, de partout...

II en a été pris des morceaux. Mon frère Jean a pêché un jour un brochet de vingt-quatre livres et Robin Joachim a pris une carpe de vingt-quatre livres.

Mathurin Boudard a enregistré, au cours de sa carrière de pêcheur quelques anecdotes aussi croustillantes les unes que les autres

Tabac

 

« Un jour d'orage, j'étais dans un autre village et il était tombé pas mal de pluie. Un copain est venu me voir et m'a demandé :« si on faisait une talmoche (vers enfilés sur un fil) » J'étais entièrement de son avis, nous avons fait chacun notre pelote et nous nous sommes préparés à aller à la pêche.

Mais le copain en avait un petit coup dans l'aile, je n'étais pas très rassuré, car nous pêchions dans le même bateau. Ce qui devait arriver arriva. À époque, je fumais ainsi que mon camarade celui-ci me dit : “On se fait une cigarette et on attaque”. II se mit d'un bout du bateau et moi de l’autre. Mais quand il fut pour s’assoir, il recula un peu trop loin et cela fit un plouf ! du tonnerre. Je réussis à d'arracher avec un peu de mal, car il avait sa cape sur le dos. Son paquet de tabac était tout mouillé..Il me dit «Tu me passes ton tabac sérieux maintenant on boit un coup et on attaque »”.

Même topo, le copain va pour s'asseoir et rebelote, dedans ! II me dit «Ramènes-moi, j'en veux plus » Il dégoulinait de partout.

Qui croyait prendre est pris

II y a environ soixante ans, mon défunt beau-père avait été intercepté par un garde-pêche. Celui-ci lui intima l'ordre de s'arrêter, mais le beau-père au lieu d'obtempérer, lui lança son sac de poissons à la figure.

Le garde fut suffoqué et le temps qu'il se débarbouille, le beau-père redescend de la butte où il était et en arrivant au bord de l'eau, il se lança à la nage. Le garde, remis de ses émotions, se lança à sa poursuite. Mais le beau-père savait très bien nager, mieux que le garde et il lui envoya un coup de pied à la figure. Celui-ci abasourdi, rejoignit le bord, tandis que le beau-père traversait et partait en courant dans les prés en direction de St-Vincent-sur-Oust. Là-bas, il trouva des amis qui lui donnèrent des fringues pour se changer et après une petite restauration, il prit le chemin du retour. En passant sur le pont de Branféré, il rencontra le garde qui s'en allait. II lui dit : “Bonjour Monsieur”. L'autre lui répondit : “Bonjour Monsieur”. II ne l'avait pas reconnu avec son nouveau costume.

 

Dans le brouillard

“Un voisin qui s'était égaré dans le brouillard a été trois ou quatre heures à tourner en rond. À la fin, il a atterri à Bains-sur-Oust ; là-bas, Il n'était pas au bout de ses peines. . Voulant faire le tour par le pont du ‘Passage’, il se mit en devoir de côtoyer le bord de la rivière, mais quelle ne fut pas sa surprise quand il mit la main sur un fil de clôture électrique ? Il fit un pas en arrière ; après ça, il s'est dit qu'il n'y avait rien à faire, il fallait qu'il passe coûte que coûte sous le fil. Mais il ne se doutait pas qu'il y avait cinq ou six taureaux dans le champ. En voilà un qui se mit à le suivre. il n'eut que le temps d'aller rejoindre son bateau, le brouillard s'étant levé. Après tous ces déboires, il rentra tout essouffler à Glénac.

 

Pris dans la glace

Un hiver, j'ai pêché sous la glace. La chose a eu lieu, il y a vingt-six ans, alors que j'allais me promener sur l'étang recouvert d'une quinzaine de centimètres de glace. Quand il y a de la glace sur l'eau, il y a un phénomène de translucidité, on voit au fond.

C'est là que j'ai aperçu mes engins qui étaient restés pris sous la glace. En frappant du pied, il s'est formé comme une boule de vase. Là je me suis posé exactement la même question que la chanson "un petit poisson, un petit oiseau s'aimaient d'amour tendre, mais comment s'y prendre". L'idée m'est venue de remonter chercher une grande hache. Avec celle-ci, j'ai pratiqué une saignée tout autour de mon engin. Ainsi, j'ai pu le sortir avec un crochet. Cela a été la plus belle pêche de ma vie dans un engin, je n’en ai jamais tant pris. Il y avait de tout, de la perche, du brochet, etc. Le lendemain, ayant bien entendu remis l'engin au fond, il y en avait autant : vingt kilos.

 

Interdit au professionnel

 

On avait un grand pêcheur, professionnel qui venait avec ses filets rafler tout. Alors les pêcheurs du coin se sont fâchés : on a planté des piquets armés de section de faucheuse. Quand il est revenu avec ses filets, les pêcheurs du coin et moi-même étions cachés derrière les haies en train de le regarde pêcher. On l'a vu tirer le filet, mais impossible de l'arracher. C'est alors que le patron a décidé d'atteler son camion sur les cordages. Impossible. Il a donné un coup de main à ses compagnons pour tirer, c'est alors que la corde a cédé. Celle-ci faisant ressort a envoyé le bonhomme â sept ou huit mètres au jus.

II n'est jamais revenu.

 

 

Les Dangers des Marais.

 

Les Dangers des Marais

                                 Les crues sont beaucoup moins importantes, moins nombreuses depuis la construction du barrage d'Arzal en 1972 et les travaux exécutés en 1982.  Avant, en effet, tous les ans, ces marais étaient inondés.Parfois les marais était entièrement glacés et les jeunes s’amusaient sur la glace, celle-ci n’était pas toujours très épaisse, cela la rendait très trompeuse et dangereuse.

                                 Quand une tempête survenait, les vagues et le courant étaient assez forts ; la marée se faisait sentir jusque là.  Une [9]marinière raconte que lorsque « on remontait à La Gacilly, il fallait traverser le marais à la perche pendant 2 kilomètres. Quand le vent était trop fort, le vent venant traditionnellement de Glénac, on jetait l'ancre et attendait l'accalmie. »

 

Accidents dans les Marais.

  Ø 1862

                                 Sur [10]le compte- rendu rédigé à l'Empereur par le Ministre de l'Intérieur, des actes de dévouement ont été signalés pour le 2° trimestre de 1862 et aux  termes d’un rapport approuvé par sa Majesté le 21 mai dernier, des médailles d'honneur en argent de 2° classe ont été décernées aux personnes  du Morbihan ci-après désignés :

Quiban (Mathurin) passager  au Port Corbin ; Busson (Jean-Marie)  forgeron à Glénac ; Cheval  (Mathurin) cultivateur à Glénac  et Rialland (Thomas), couvreur à Glénac.

     « A Glénac, le 22 mars 1862, ces personnes se sont dévouées pour secourir quatre personnes exposées à périr  dans le marais ».

 Ø  1866

                                 Le[11] 17octobre dans la matinée, le cadavre du sieur Robert  Mathurin, domestique, âgé de 16 ans, a été retiré de la rivière d'Oust, près du bourg de Glénac .Ce jeune homme s'était noyé accidentellement, la veille , en tombant d'un bateau dans lequel il passait des bestiaux pâturant de l'autre côté de la rivière.

 Ø  1867

                                 Un[12] acte de dévouement remarquable a été accompli par une toute jeune fille, à Glénac.

Les marais étaient gelés. Plusieurs enfants y glissaient ; la glace se rompit et un garçon de 7 ans disparut. Alors Jeanne-Marie Méaude, âgée de 14 ans,  se dirigea  vers l’endroit du sinistre, sans hésitation et ayant saisi l'enfant par les bras, put l'arracher d'une mort certaine. Il y a trois ans, elle se jeta dans l'Oust, à Port de Roche, pour sauver un enfant âgé de 5 ans que le courant entrainait.

 

Ø  1884

                                 Le [13]cultivateur Méaude, demeurant au village de Port-Roche en la commune de Glénac, conduisait ses vaches au champ dans les marais voisins. Pour passer la rivière, cours d'eau qui se décharge du canal de l'Oust, il avait mis onze bêtes à cornes sur le bateau destiné à ce service. Mais, à moitié route du rivage, les vaches se sont avancées sur le devant de l’embarcation ,et celle-ci  a sombré par une profondeur de deux mères d’eau d'eau. Tous les bestiaux se sont sauvés à la nage ; seul le conducteur s'est noyé.

.Ø  1894

Mort accidentelle. —

Le dimanche 7  janvier, vers 3 h 1/2 du soir, le nommé Sabot, Pierre-Marie, âgé de 38 ans, tisserand, demeurant au village de Bressillian, commune de Saint-Vincent, qui revenait du bourg de Glénac en compagnie de son beau-frère Robin, Julien-Marie, âgé de 38 ans, tisserand, demeurant au village de la Prévôsté, même commune, en traversant sur la glace les marais qui séparent les communes de Saint-Vincent et de Glénac, s'est noyé accidentellement en traversant la rivière de l’Oust dont la glace, qui avait à peine un centimètre d'épaisseur au milieu, s'est rompue sous ses pieds. Il a disparu presque aussitôt, sans que le nommé Robin qui marchait un peu derrière lui, ait eu le temps de lui porter secours.

Le lendemain 8 janvier, des recherches ont été faites dans la dite rivière, à l’aide de crocs et de longues perches et, vers 4 heures du soir, le cadavre de Sabot a été découvert par plusieurs personnes de Glénac et de Saint-Vincent et transporté à son domicile. Cette mort étant purement accidentelle M. le Maire de Saint-Vincent a ordonné à sa famille de procéder à son inhumation .

                                

Ø  1920

                                              Les Ponts[14] et Chaussées ont procédé au nettoyage des marais de Glénac. Jean-Marie Danet, maçon à Peillac et travaillant à la drague, perdit un moment l'équilibre et tomba dans la vasière.

L'éclusier qui avait vu l'accident se porta aussitôt au secours de Danet qu'il ne put retrouver qu'au bout d'une demi-heure. On s'empressa autour du noyé pour lui prodiguer les soins nécessaires, mais rien ne put le faire revenir à la vie. Danet était un très bon nageur, aussi doit-on supposer qu'il a été pris de congestion, à moins que la vase n'ait paralysé ses mouvements, l'empêchant de remonter à la surface

 

 

 

 

Légendes et Contes des Marais

La Tourelle de L'Enchanteur

Dressé sur une plate-forme sauvage et dénudée, le château, de ce côté, dominait toute la contrée de ses murs  altiers, bâtis tout au bord d’un profond précipice. D’un côté, il présentait sa façade au petit bourg de Glénac ramassé sur lui-même à l’abri du manoir.

Le corps principal de logis était flanqué de deux tourelles dont l’une portait le nom de « tourelle de l’Enchanteur »parce que ,dans les temps reculés, l’enchanteur Merlin avait, disait-on, séjourné chez les ancêtres du comte de Glénac.

Le créateur de la Table Ronde protège le château et son influence peut agir en cercles concentriques autour de celui-ci, comme en témoigne le conte bref intitulé « le Feu de Merlin »

Dame Blanche des Marais

 

 

Ë LEGENDE

C'est,[15] dit-on, une noble châtelaine, madame Ermengarde de Malestroit, qui revient visiter de nuit ses anciens domaines et glisse, sans radeau ni barque, sur les eaux tranquilles des marais de l'Oust

Elle est grande, belle, majestueuse. Son corps est souple et ondule avec grâce au souffle de la brise. Sa longue chevelure se déploie et l'entoure comme un vaste manteau.

Les soirs d'automne, quand l'air est calme et chaud, on la voit parfois grandir, grandir et toucher du front les étoiles. Si le vent des nuits se lève, elle se prend à osciller lentement, comme faisait, en sa vie mortelle, madame Ermengarde, lorsqu'elle dansait le menuet du bon duc François de Bretagne. Puis les plis de sa robe deviennent diaphanes : la lune perce les flots de ses cheveux. Puis encore, si le vent redouble, elle se suspend tremblante à son aile, et monte avec lui vers le firmament.

Le lieu où elle se tient d'ordinaire est situé au milieu des marais. Tout près de là l'Oust et une autre rivière croisent leurs courants, ce qui détermine un tournant fort dangereux en tout temps et qui devient, lors de la crue des eaux, un véritable gouffre. Le jour, on le voit de loin bouillonner et lancer vers le ciel une vapeur blanchâtre ou teinte des couleurs de l'arc-en-ciel. La nuit, on ne voit que la Femme Blanche. Aussi certains prétendent-ils que la Femme Blanche n'est que la vapeur du gouffre de Trémeulé, mais ils se trompent grandement s'ils le pensent ; s'ils le disent, ils font acte téméraire. Madame Ermengarde, en effet, s'est vengée plus d'une fois cruellement des incrédules et ceux qui doutent ,font prudemment de ne point donner leurs chalands au courant de l'Oust, une fois que l'étoile du Nord s'est levée sur les arbres noirs de la Forêt-Neuve.

Paul Féval connaissait bien la région pour y avoir séjourné chez son oncle à Glénac.

Dans [16]son livre de souvenirs "Mémoire du Pays", Jean Rouxel apporte quelques précisions sur les lieux du drame : "En face de ce lieu sinistre, du côté de Bains, tout près de l'Ile aux Pies, une énorme pierre, debout sur une autre, au ras de l'eau s'appelle la Roche à la Demoiselle, car elle était hantée la nuit par une belle jeune fille vêtue de blanc qui ne dit rien à personne. Ce personnage a peut-être servi de thème à Paul Féval pour son roman de la Dame  Blanche des Marais. Les principales péripéties de cette histoire se déroulent en effet dans ces parages qu'il appelle le tournant de Trémeulé"

 

La Dame Blanche et les  Marais

 

En cette humide matinée d’automne, le comte Jean de Glénac était songeur, Rosen, sa fille bien-aimée, était loin du château familial et nul ne savait quand elle reviendrait au pays natal. Le vieil homme avait essayé de tromper son ennui de multiples manières, mais la chasse au cerf, les longues parties d’échec et la douce musique de son petit harpeur ne pouvait remplacer la présence de sa chair. Comme perdu dans une rêverie sans fin, le seigneur des Marais laissait errer son regard sur un paysage aquatique les oiseaux frôlaient l’eau de leurs ailes puissantes.

Ce matin-là, jour de grâce de l’an 1489, les pêcheurs revenaient au bourg avec leur pesant d’anguilles grasses et luisantes. Tous sauf un, Hervé du chemin de l’Oye. Déjà une certaine inquiétude régnait car la broue faisait son apparition, transformant le marais en un lieu indéfinissable, royaume sans frontière de la Dame blanche. Elle étendait son manteau brumeux sur les imprudents et plus personne ne les revoyait.

La froidure pénétrait les os d’Hervé; il s’employait à lutter contre elle en poussant plus fort sur la perche. Mais où était donc le bourg ? Le jeune homme voyait se dessiner la Dame Blanche ; c’était bien elle qui le faisait tourner en rond, depuis combien de temps au juste ? Ivre de fatigue, Hervé avait sombré dans un sommeil traversé d’images macabres. À vrai dire, le jeune homme était plus mort que vif ! Il gisait au fond de son embarcation comme un animal blessé attendant que vienne l’ultime délivrance.

Quelques émeraudes étaient tombées du diadème de la Dame Blanche et s’étaient transformées en feux follets qui encerclaient Hervé. Devant lui, aussi loin que portait son regard (à une distance vraiment minime) ce n’était que mortelle blancheur.

Soudain, Hervé aperçut au loin un feu rougeoyant, situé à une hauteur respectable. Quelques secondes plus tard, la céleste clarté se transforma en une énorme sphère rougeâtre qui se mit à tournoyer sur elle-même à très grande vitesse.

Alors Hervé éprouva un regain de vitalité et reprit le combat, arcbouté sur sa perche, il fit route sur la sphère enflammée en ne songeant à rien d’autre qu’à s’en rapprocher le plus vite possible. Il arriva au bourg dans un piteux état, mais sain et sauf ! Ses voisins le croyaient disparu à tout jamais, car son absence avait duré trois jours et trois nuits. Hervé fut abasourdi en apprenant cela.

Il fut mandé au château afin de raconter son histoire .

Après avoir écouté attentivement le récit du jeune pêcheur, le comte Jean qui était assis au coin d’une vaste cheminée de granit se leva et conduisit Hervé devant une collection de tapisseries très anciennes. Sur une d’elles était figuré le protecteur du château, l’enchanteur en sa douce forêt de Brocéliande.

                                

Merlin

 

                                 Dans les temps reculés, Merlin a séjourné en ce castel dit le comte Jean . L’une des deux tourelles qui flanquent le corps du logis fut jadis nommée tourelle de l’Enchanteur , et aujourd’hui, nul n’a le droit d’y pénétrer. Comprends-tu ce que cela signifie ?

Ce feu écarlate auquel tu dois la vie brillait au sommet de cette tourelle, mais durant trois jours et trois nuits tu fus le seul à pouvoir le distinguer. Il en va toujours ainsi.

Hervé regagna sa chaumière et recouvra quelques forces, mais de mémoire de vivant, jamais on ne le revit aller taquiner l’anguille et le brochet. Ce qui tendrait à prouver qu’il n’était point dénué de sagesse [17]..


 

Le Passeur de  Branféré

                                 Bien avant [18]que le canal Nantes à Brest n'existe, des passeurs, postés à Branféré, commune de Glénac, se chargeaient de transporter, d'une rive à l'autre, les personnes et aussi les bêtes dans de grandes barques plates, sans compter les foins à la belle saison. Mais jamais les hommes ne se seraient risqués à transporter qui que ce soit une fois tombée la nuit. C'était un interdit.

Pourtant un soir, des coups furent frappés à la porte de leur refuge situé en haut de butte. Ils ne répondirent pas. La mère dit d'ailleurs « Ce n'est plus le moment ! L'heure est passée. »

Bien entendu, les coups recommencèrent et la demande plus insistante, plus forte encore. Quelqu'un s'est résigné à descendre.

Le client était vêtu d'habits sombres, on n'en distinguait rien.

Au moment où le passeur prenait la barque, le croyant seul sans doute, l'homme lui dit : « Non, pas la barque, la barge » ! »

Il passa donc l'homme sur l'autre rive et, là, après un appel, il fit monter des louves. Le passeur en compta quatre-vingt-dix-neuf (avec l'homme cela faisait cent).

                                 Quand le chargement fut de retour vers Glénac (Yena), l'homme et les bêtes descendirent de la barge et c'est en les voyant descendre que le père vit que l'homme avait des pieds en sabots de bœuf.

Celui-ci lui demanda combien il devait pour ce passage et le passeur effrayé répondit : « Rien... je ne veux rien. » Il avait trop peur et ne croyait dans ce moment-là que ses yeux. C'était sûrement le maudit.

            L'autre insista et voyant le silence de son batelier, il lui dit en lui jetant une bourse de pièces : " Voilà pour vous, j'y tiens ! mais que je ne vous revois point le soir !" .

Passeur de Bercihan à Glénac

                                 Avant le canal, les passeurs ne sortaient pas la nuit. Pourtant, une nuit, quelqu'un frappa à la porte.

Un homme sombre demanda de l'emmener de l'autre côté du marais pour amener des moutons.

Quand ils revinrent, l'homme demanda combien il devait.

L'autre répondit « Rien. - Tant mieux, dit l'autre, sans cela je t'emmenais ! »

C'était le diable.

Il avait bien vu le passeur, le bateau s'était enfoncé jusqu'au bord, sans qu'il puisse voir pour autant ce qu'il transportait dedans.

Croyances et mystère

Nombreuses sont aussi les croyances, les apparitions attachées aux marais. Connaissez-vous les Clairoux ? "Ce sont des feux follets visibles surtout dans les endroits marécageux. Etant allé une nuit voir un malade, on envoie le pâtou me reconduire à ma voiture pour en rapporter un médicament. Le garçon, épouvanté, me montre des feux follets : "Donnons-nous à garde, v'là des clairoux "6

L'aspect mystérieux, souvent inquiétant des marais, des zones humides en général, a toujours nourri l'imagination populaire et donné naissance à des histoires de tous les temps dans tous les pays. Ces contes et ces légendes sont d'un intérêt universel.


[1] Pierre Merlet revue Morbihanaise Le comté de Rieux

[2] Le Progrès du Morbihan 6 décembre  1884

[3] Extraits de Conversations

[4] Extraits de Conversations

[5] Les Informations

[6] Journal de Ploërmel -6 Décembre - 1890

[7] L'Avenir du Morbihan –Novembre 1891

[8] Association patrimoine Redon

[9] Annales de l’A.P.P.H.R 1999

[10] Courrier de Bretagne -17 décembre 1862 -

[11] Courrier de Bretagne -24 octobre 1866  -

[12] Courrier de Bretagne -06 février 1867  -

[13] Courrier de Bretagne -2 novembre 1884-

[14] Le Progrès du Morbihan 16 octobre  1920

[15] Contes de Paul Féval

[16] Mémoire du Pays

[17] D’après le thème d’un roman d’Yvonne Morancé

[18] Auteur M. Poulain

19)Les informations-Archives Guillouche Debray Anne Glénac